Pour souligner que le mois de mars fête la journée des femmes, la Chaire souhaite partager avec vous des témoignages de femmes œuvrant en sciences et en génie afin de démystifier ces professions et présenter des modèles de femmes qui étudient ou qui s’accomplissent professionnellement en sciences et en génie. Voici le cinquième témoignage du mois, Audrey Corbeil-Therrien, étudiante en génie électrique.
Dans quel domaine faites-vous vos études et quel est votre sujet de recherche?
Je suis étudiante au doctorat en génie électrique. Ma thèse porte sur les détecteurs de radiations pour les scanneurs médicaux, plus précisément la tomographie d’émission par positrons (TEP). La TEP permet de visualiser certains processus métaboliques via des molécules appelées radiotraceurs. Ce type de scanneur est beaucoup utilisé pour la recherche sur le cancer.
Pour obtenir une image nette, la performance du détecteur est cruciale. Mon projet de recherche porte sur la conception de détecteurs plus performants en utilisant des photodétecteurs capables de mesurer le temps d’arrivée d’un unique photon avec une précision de 10 ps. En 10 ps, la lumière voyage de 3 mm, donc avec une telle précision, nous serons capables de calculer la distance parcourue par le photon et retrouver son point d’origine.
Pourquoi avoir choisi le domaine du génie? Qu’est-ce qui a provoqué un déclic en vous qui vous a poussé vers le génie ?
J’ai toujours été fascinée par les sciences. Mais mon intérêt a été fortement façonné par la révolution que j’ai vécue. Au cours des années 1990-2000, les ordinateurs personnels, puis internet et enfin les cellulaires ont envahi notre quotidien. Tous ces outils fonctionnent grâce à des signaux électriques, et je voulais comprendre et participer à cette révolution. Des bidules électriques, il y en a partout! En médecine, en construction, en divertissement, en aérospatiale… je ne voyais pas de limite quant aux projets possibles en génie électrique.
Qu’est que vous vouliez faire quand vous étiez petite ?
J’ai voulu faire plusieurs métiers quand j’étais petite! Je me souviens avoir voulu être médecin, ou enseignante. Adolescente, j’ai longtemps songé à devenir physicienne ou chimiste, jusqu’à ce que j’apprenne ce que c’était le génie, plus particulièrement le génie électrique. L’électricité me fascinait (et me fascine toujours) et je voyais là un moyen de me concentrer sur ce qui m’intéressait le plus, avec une perspective d’emploi intéressante.
Mais voici ce qui est vraiment intéressant. Je suis ingénieure électrique spécialisée en imagerie médicale (médecine!) utilisant les principes de la radioactivité (physique!) cheminant dans le monde académique dans le but de devenir professeure à l’université! J’ai trouvé un moyen de faire tous les métiers dont je rêvais!
Aviez-vous un modèle féminin à qui vous vouliez ressembler lorsque vous étiez plus jeune, que ce soit enfant ou adolescente?
Je me souviens d’avoir admiré Julie Payette. Je trouvais qu’elle était bien courageuse d’aller dans l’espace et j’admirais toutes les connaissances qu’elle avait. Ça me semblait un idéal difficile à atteindre, mais quelqu’un l’avait fait!
Quels sont vos passe-temps ?
J’ai toujours été une passionnée de lecture, particulièrement les histoires fantastiques et de science-fiction. J’aime comment ces livres permettent d’explorer différents modèles de société et comment une technologie (ou un pouvoir surnaturel) peut avoir un impact sur les personnages.
Depuis sept ans maintenant, je fais du kickboxing. Ce sport très physique me permet de maintenir un équilibre avec mon travail plus intellectuel. Le sport, et les arts martiaux en particulier, me permettent de me changer les idées et de revenir au travail avec une tonne d’idées, en plus de me garder en forme et de me donner confiance en mes capacités.
Quel est votre plus grand rêve ?
Je rêve d’un monde où la propagande anti-scientifique n’existe plus et où la population possède une meilleure compréhension de la science et de ses méthodes. Il faut certainement conserver notre scepticisme et la méthode scientifique qui permettent de faire avancer la science, mais la culture anti-scientifique qui grandit depuis quelques années est grandement toxique, particulièrement en santé. Les gens refusent des traitements parce qu’ils ne comprennent pas la science et qu’ils en ont peur. Il faut trouver un moyen de rendre la culture scientifique plus accessible, conviviale et rassurante.
Quelles sont vos plus grandes fiertés sur le plan personnel et professionnel ?
Ma plus grande fierté est mon parcours académique. Lorsque j’ai commencé ma maîtrise, j’avais beaucoup d’inquiétudes. Je me demandais si j’allais réussir, si c’était vraiment la carrière que je voulais. Mais je me rassurais en me disant que j’avais toujours le droit de changer d’idée.
J’arrive aujourd’hui à la fin de mon doctorat. Je regarde tout ce que j’ai accompli et je peine à croire que j’ai réussi à faire tout ça. J’ai publié des articles scientifiques et j’ai présenté mes travaux dans des congrès internationaux devant des centaines de personnes. J’ai gagné plusieurs prix pour ces présentations alors que j’essayais seulement que de partager ma passion avec d’autres chercheurs. Et même avec tout ça je réussi à enseigner et à m’impliquer dans des projets dans ma communauté. Je suis très fière de ce que j’ai accompli pendant mes études et j’ai très hâte d’obtenir le titre de docteur!
Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles pour les encourager à s’intéresser aux sciences et au génie ?
Les sciences et le génie ont grandement amélioré notre qualité de vie, et continueront de le faire. Les carrières dans ce domaine sont très variées et malheureusement méconnues. Il ne faut pas avoir peur d’explorer et d’essayer!
Lorsque je ne voulais pas faire quelque chose par peur d’échouer, mes parents m’ont toujours dit d’essayer avant de déclarer que je n’étais pas capable. Cette manière de penser m’a amenée loin, mais aujourd’hui j’y ajouterais ceci : tout le monde est mauvais au début, avant de devenir expert. Le secret, c’est de continuer d’essayer!